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Miriki: Les dangers de la guerre par procuration

 

Longtemps vacillant entre ce qu’il convient de nommer «syndrome Hutu-Nande» et un conflit foncier latent, l’environnement sécuritaire dans la partie sud du territoire de Lubero s’est brutalement dégradé dans la nuit du 07 au 08 janvier 2016 à la suite d’un massacre de 18 civiles dans la localité de Miriki. Des femmes et des enfants y ont été lâchement assassinés au moyen d’armes blanches par un groupe d’assaillants soupçonnés d’être des éléments Hutu rwandais des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR).

Enkystés dans les confins des forêts du territoire de Walikale depuis la chute du régime Habyarimana, les FDLR ont réussi à survivre aux opérations militaires, ainsi qu’aux différents programmes de désarmement, rapatriement et réinsertion lancés dans la zone, en associant les forces belligérantes et les milices locales actives dans la région, en particulier le groupe UCPC de Kakule Sikuli Lafontaine. Cet ancrage leur a permis de s’assurer d’une autorité de fait dans les entités occupées où ils pratiquent l’agriculture, le commerce et l’exploitation des ressources minières au détriment de la population locale.

Devant l’impuissance des forces de sécurité congolaises, y compris des forces de la mission de paix de l’ONU, les autorités coutumières ont résolu d’organiser la jeunesse pour se débarrasser d’un hôte dont le comportement dépassait le degré minimal du tolérable. Tout commence alors au dernier trimestre 2015, au cours duquel les miliciens FDLR ont été confrontés à une jeunesse déterminée, appelée Mai-Mai Kyaghanda Yira et plus tard Union des Patriotes pour la Défense des Indignés (UPDI). D’après plusieurs sources, au début cette milice a bénéficié d’un appui substantiel des Forces Armées de la RDC.

Après avoir été délogés dans plusieurs de leurs bastions, les miliciens FDLR n’ont pas hésité à réagir. Ils vont s’en prendre aux populations civiles, y compris les chefs coutumiers pour leur rôle présumé ou réel dans l’organisation du mouvement Mai-Mai Kyaghanda Yira. La femme et deux enfants du chef de Miriki ont été tués lors du massacre. À la surprise de la milice, les FARDC ne l’ont pas soutenue lors de l’agression par les FDLR.

Des sources locales suggèrent que le commandant «Justin» des FARDC, non autrement identifié, aurait joué un rôle déterminant dans les massacres de Miriki. Ces soupçons sont fondés sur un message (texto) échangé entre monsieur ALAWI IYADE du groupe FDLR RUD et un officier FARDC se renseignant sur le sort d’un infirmier orthopédiste, message qui est tombé par mégarde sur le téléphone d’un autre infirmier. L’auteur du message craignait que l’infirmier qui avait l’habitude de le soigner ait été victime de la tuerie.

Un second massacre, avec 4 personnes tuées et cinq blessées, s’est produit dans le village de VIRIRA près des localités de Mighobwe et de Kaseghe, en territoire de Lubero, le vendredi 22 janvier 2016. Au même temps, on faisait état de l’arrivée dans la localité de Kimaka de 144 éléments FDLR dans le but d’atteindre la localité de Buleusa proche de Miriki ; la population locale les soupçonnent de vouloir récupérer leurs terres abandonnées. On rappelle que Buleusa s’était vidé de ses habitants peu avant le dernier trimestre de 2015 à la suite des affrontements entre les éléments de l’UPDI et la coalition FDLR-UPCP et ce, après la découverte de deux fosses communes.

Devant la détérioration de la situation, certains éléments de l’UPCP de Lafontaine ainsi que plusieurs jeunes venus de Butembo et Beni ont résolu de se joindre à l’UPDI pour combattre ce que la plupart d’entre eux qualifient d’occupation étrangère.

Une chose est sûre à ce stade : compte tenu des tensions récurrentes entre la communauté Nande et les FDLR, mais aussi entre les Nande et des migrants Hutu congolais dans cette région, les FARDC ont sans doute commis une erreur en se rangeant aux côtés d’une milice locale.

Nickson Kambale est avocat au barreau de Kinshasa et associé au Groupe d’étude sur le Congo.

 

 

 

 

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